Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
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Au moment où la défenseure marocaine des droits de l’Homme, Khadija Ryadi, lauréate du prix 2013 des Nations Unies des droits de l’Homme, était en tournée en Europe pour sensibiliser à cette cause, on avait au moins espéré une petite accalmie sur le front des arrestations abusives et des procès à caractère politique pendant cette période. Mais hélas, c’était sans compter avec la volonté des autorités marocaines de persister dans leur logique de s’attaquer à toutes celles et à tous ceux qui bougent sur ce terrain.
Non seulement Khadija Ryadi a eu droit à sa part de provocations et d’intimidations, mais les procès et les arrestations ont continué de plus belle. Si on excepte une libération en fin de peine et deux heureuses relaxes, les informations relatives aux atteintes des droits de l’Homme que l’ASDHOM a reçues sont inquiétantes et préoccupantes. Ce point 54 leur est consacré.
Commençons par les bonnes nouvelles.
Groupe Liberté d’expression-Syndicalistes : Le responsable syndical (CDT-Ouarzazate), Hamid Majdi, a été enfin acquitté par le tribunal de Marrakech. Le procureur du roi qui avait fait appel quand Hamid Majdi avait été innocenté en première instance, a été désavoué. Une grande victoire pour ce défenseur infatigable des ouvriers-mineurs d’Ouarzazate, qui est due aussi à la mobilisation des épris de justice, de ses avocats, de ses camarades du syndicat et de toutes les organisations démocratiques qui lui ont apporté leur soutien.
L’ASDHOM tient à le féliciter pour son engagement et à féliciter toute sa famille et ses camarades de lutte pour cette victoire. Restons vigilants tout de même.
Groupe Liberté de culte : Le Marocain, marchand ambulant de son état, qui s’était converti il y a sept ans au christianisme à Taounate, a été relaxé par la Cour d’appel de Fès dans un procès tenu le jeudi 13 février 2014 (voir points précédents). Rappelons que Mohamed El- Baldi avait été condamné en première instance à 2 ans et six mois de prison après avoir été arrêté le 27 août 2013 par les gendarmes d’Ain Aicha (Taounate) et sur la base de l’article 220 du code pénal marocain qui prévoit des peines entre six mois et trois ans et d’une amende de 100 à 500 dirhams pour toute personne qui emploie « des moyens de séduction dans le but de convertir un musulman à une autre religion… »
Encore une victoire à mettre à l’actif des défenseurs de droits de l’Homme au Maroc. Toutes nos félicitations.
Groupe Ouarzazate-Microcrédit : Amina Mourad et Bennacer Ismaini, les deux coordinateurs du mouvement de défense des victimes des dérives du microcrédit à Ouarzazate (voir points précédents), ont été condamnés, le mardi 11 février, à un an de prison ferme et à 10 000 dirhams d’amende. L’ASDHOM n’a cessé de les soutenir tout en dénonçant l’acharnement du procureur du roi et de l’organisme du microcrédit INMAA qui a déposé plainte après que le tribunal les ait innocentés dans un précédent procès. Les victimes des dérives du microcrédit, venues en nombre de toute la région, se sont rassemblées devant le tribunal d’Ouarzazate pour exprimer leur solidarité entière avec les deux coordinateurs.Amina et Bennacer n’avaient que dix jours devant eux pour faire appel en cassation contre ce jugement injuste et qui intervient après un procès entaché de multiples irrégularités et où on voit que la justice a pris parti pour les organismes du microcrédit contre les victimes de leurs dérives et leurs défenseurs.
L’ASDHOM dénonce fermement ce jugement inique et réclame son annulation. Les défenseurs des victimes méritent mieux que ça.
Groupe Sahraouis-Ifni-Tiznit-Ait Melloul-Inzgane : Après huit mois de prison ferme, passés dans les prisons d’Ait Melloul et Tiznit, le militant Mohamed Amzouz (voir points précédents) vient d’être libéré le mardi 11 février. Sa famille et ses camarades s’apprêtaient à l’accueillir à Sidi Ifni, la ville où il avait été arrêté suite à des manifestations pacifiques réclamant des emplois et l’amélioration des conditions de vie des habitants, quand les forces de l’ordre ont procédé à l’interpellation et l’arrestation à un barrage, dressé à l’entrée de Sidi Ifni, de quatre jeunes sahraouis, venus participer à cette cérémonie d’accueil. Il s’agit de Bachir Bouâmoud, de Mohamed Jemour, de l’étudiant et journaliste Sidi Sbai, tous membres de l’AMDH-section Laâyoune, ainsi que l’ancien détenu politique sahraoui Hafed Toubali. Ils ont été traduits devant le tribunal de première instance de Tiznit, le 13 février, pour « offense à un agent d’État dans l’exercice de ses fonction, violence et non obéissance ».
Leur procès a été reporté au 17 février. L’ASDHOM dénonce une atteinte à la libre circulation et réclame leur libération immédiate. Le chef d’accusation utilisé est fallacieux et ne correspond en aucun cas à ces défenseurs des droits de l’Homme et bloggeurs.
Le 6 février 2014, un autre groupe de dix Sahraouis, dont trois mineurs, a vu son procès reporté par la Cour d’Agadir au 18 mars prochain. Hamza Tamek, Omar Ben Yazide et Rachid Ben Said, les trois mineurs, qui ont eu une audience à hui-clos sont actuellement incarcérés à la prison d’Inzgane, quant au sept autres (Hiba Chouiâr, Mohamed lamine Attar, Mohamed Hasnaoui, Hassan Ghazouani, Moussa Malki, Mohamed Hammou et Abdallah Boukayoud), incarcérés à la prison locale d’Ait Melloul, ont eu droit à une audience publique. Tous les dix avaient été arrêtés en septembre 2013 à Guelmim après une manifestation de soutien aux participants au campement Tizimi qu’avait connu la ville d’Assa et qui a été violement démantelé par les forces de l’ordre entrainant la mort, le 23 septembre 2013, du jeune sahraoui Rachid Echine.
Le 12 février, la même Cour d’appel a condamné, cette fois-ci, le jeune Sahraoui Mohamed Daoudi, à deux ans de prison ferme sans lui permettre de prévenir sa famille, ni même d’être défendu par un avocat. Rappelons qu’il a été arrêté le 23 décembre 2013 à Guelmim suite aux mêmes événements liés au campement Tizimi d’Assa et placé en détention à la prison d’Inzgane. Trois de ses frères sont déjà condamnés et son père, Mbarek Daoudi, 58 ans, attend d’être jugé par le tribunal militaire permanent de Rabat (voir points précédents).
Groupe Imider-Mineurs : Dans nos précédents points, nous avions signalé les enlèvements de Hamid Berka et d’Ichou Hamdan, survenus respectivement le 28 et le 30 décembre 2013 à Imider, et placés, depuis, en détention à Tinghir. Leur procès s’est enfin ouvert le vendredi 14 février 2014. Nous y reviendrons dès qu’on a plus d’éléments.
Nous vous informons par contre qu’aujourd’hui, en principe, Idir Oukhydir, arrêté le 13 février 2013, devrait quitter la prison après avoir été condamné à un an de prison ferme.
Pour clore ce point hebdomadaire, voici des dates importantes pour l’ASDHOM à retenir.
– 18 février : L’ASDHOM signe et appelle à signer le texte en soutien à Maître Buttin, avocat de la famille Ben Barka, qui sera jugé par le Tribunal de grande instance de Lille pour une soi-disant divulgation du secret de l’instruction dans l’affaire Mehdi Ben Barka.
Un rassemblement de solidarité est prévu ce mardi à 14h devant ledit tribunal.
– 20 février : L’ASDHOM participe, dans le cadre de la semaine anticoloniale, à une rencontre à Paris sur les prisonniers politiques et d’opinion au Maroc.
Voir le lien suivant pour le programme de la semaine http://anticolonial.net/spip.php?article2934
– 21 février : L’ASDHOM participe avec d’autres associations de l’immigration marocaine à un débat à l’occasion du troisième anniversaire du mouvement 20-Février sur « les libertés démocratiques au Maroc à l’aune du 20-Février » en présence du rappeur du mouvement, Mouad Belrhouate, alias Elhaqed, qui vient de sortir son nouvel album, Waloo, et qu’il n’a pas pu présenter au Maroc à la librairie Al-Karama de Casablanca, celle-ci ayant reçu l’interdiction officielle alors qu’en quarante ans d’existence, la librairie n’avait jamais demandé d’autorisation pour ce genre d’événements culturels.
Le bureau exécutif de l’ASDHOM
Paris, le 15 février 2014