Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
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Aux yeux de Mohamed Sebbar, secrétaire général du conseil national des droits de l’Homme (CNDH), le Maroc est le pays qui a indemnisé le plus au monde ses victimes des violations des droits de l’Homme. Ces propos ont été tenus lors du forum organisé dernièrement par la très officielle agence de presse marocaine (MAP) sur les droits de l’Homme. Une façon pour lui de vanter « l’exception marocaine ». Et Mohamed Sebbar d’ajouter que ce sont les comportements et les slogans des manifestants qui légitiment parfois les interventions violentes des forces de l’ordre. Ces paroles nous rappellent celles d’un ancien président duCCDH, l’ancêtre du CNDH. Ahmed Harzeni, une ancienne victime, comme Mohamed Sebbar d’ailleurs, avait soutenu lors des auditions publiques de l’IER en 2004 que la violence de l’État marocain des années de plomb ne faisait que répondre à la violence des opposants.

Mohamed Sebbar a oublié qu’il scandait, il n’y a pas si longtemps que ça, les mêmes slogans et dénonçait avec ses camarades de lutte la brutalité des forces de l’ordre. Peut-être s’imagine-t-il maintenant que le Maroc est devenu cet État de droit où règne une liberté à la « Sebbar » et où les manifestants doivent d’abord passer prendre et valider leurs mots d’ordre au CNDH avant d’aller manifester ? Un peu de décence Monsieur Sebbar !

Nous lui suggérons d’aller plutôt s’acquitter de l’une de ses prérogatives qui est de s’enquérir de l’état de santé des centaines de prisonniers politiques et d’opinion qui observent actuellement des grèves de la faim. Les informations que nous avons reçues des prisons marocaines nous préoccupent au premier plan.

Groupe UNEM-Fès : Après plusieurs reports de leur procès, les douze militants de l’UNEM-Fès (Adil Abioui, Bouchta Janati, Abderrahim Baraka, Abdelfattah Meskine, Mustapha Bakrati, Brahim Saâou, Mohamed Nadi, Jalil Sahib, Khalil Karbaoui, Mehdi Chhiti, Hakim Hachimi et Mohamed Ait Rais), arrêtés le 28 mars 2014, ont été condamnés par le tribunal de Fès, le 21 avril, à 4 mois de prison ferme et une amende de 500 dirhams chacun. Rappelons qu’ils avaient observé des grèves de la faim pour dénoncer les conditions de leur procès, l’interdiction faite à leurs proches d’assister au procès (plusieurs d’entre eux ont été retenus et interrogés pendant des heures au moment de l’audience du 14 avril) et pour réclamer l’amélioration des conditions de détention à la prison Ain Kadous. Ils font l’objet de multiples agressions dirigées par le responsable du pénitencier.

Toujours à Fès, quatre autres militants dont trois anciens prisonniers politiques (Mohamed Ghalout, Omar Taybi et Brahim Lahboubi) ont été arrêtés le 24 avril 2014. Ces arrestations surviennent au moment où l’UNEM-Fès a décidé des journées d’action et de mobilisation dans des villages avoisinant la ville de Fès (Taounate, Mrirt, Menzel, Guercif, etc.)

Groupe UNEM-Meknès : le 21 avril 2014, les cinq prisonniers politiques de l’UNEM-Meknès (Mounir Ait Khafou, Hassan Koukou, Soufiane Sghéri, Hassan Ahamouch et Mohamed Eloualki) ont encore une fois vu leur procès reporter au 5 mai 2014. Rappelons qu’ils sont à la prison Toulal2 de Meknès depuis le 17 décembre 2012 et qu’ils n’ont cessé de mener des grèves de la faim et de la soif pour réclamer sinon leur libération, du moins l’amélioration des conditions de détention et la tenue rapide de leur procès.  

Groupe 20-Février-Casablanca : Le 22 avril 2014, le procès des onze manifestants et militants du 20-Février (Hamza Haddi, Youssef Bouhlal, Ghani Zaâmoun, Ayoub Boudad, Hakim Sarroukh, Mohamed Harrak, Abdellatif Sarsari, Mustapha Aârass, Hamid Alla,Amine Kabbabi, Fouad El-Baz), arrêtés le 6 avril à Casablanca lors d’une manifestation intersyndicale, a été reporté pour la deuxième fois au 29 avril. La demande de liberté provisoire pour les neuf premiers placés en détention à la prison Oukacha a été rejetée. Les familles et les soutiens, venus de plusieurs villes et empêchés d’assister au procès, se sont rassemblés en face du tribunal pour scander leur mécontentement et dire leur solidarité avec les prévenus. Les neuf prisonniers politiques observent une grève de la faim de plus de dix jours et leur santé se détériore de jour en jour. Des sit-in et grèves de la faim ont été organisés à Chefchaouen, Rabat et Casablanca en soutien aux prisonniers du 6 avril.

Groupe Diplômés-Chômeurs-Rabat (nouveau) : Neuf diplômés chômeurs ont été arrêtés le 3 avril à la gare de Salé après avoir participé avec leurs camarades à un sit-in à Rabat pour réclamer des emplois. Ahmed Nioua, Abdelhaq Haraâ, Mustapha Abouzir, Rachid Benhamou, Khamis Moufid, Soulayman BenYarou, Youssef Mahfoud, Aziz Zitouni et Mohamed Allali ont été répartis en deux groupes. Le premier a été présenté au tribunal le 21 avril et le deuxième le sera le 28 pour officiellement « perturbation de la circulation du train ». Ils ont été placés en détention à la prison Zaki de Salé. Les familles, soutenues par les associations de défense des droits de l’Homme, se sont retrouvées le 16 avril se constituer en comité de soutien et entamer des actions de mobilisation pour réclamer leur libération.

Groupe Sahraouis-Ait Melloul et Tiznit : Le jeune sahraoui Brahim Chouiâr (25 ans) a été condamné le 17 avril par la Cour d’appel d’Agadir à 4 mois de prison ferme. Il est sorti libreà l’issue de ce procès puisqu’il avait passé presque 6 mois en détention provisoire après avoir été arrêté le 23 octobre à Assa suite aux manifestations qui ont succédé le démantèlement violent du campement Tizimi. Toutes nos félicitations à Brahim et à sa famille.

Son camarade Mohamed Lamine Attar, arrêté le 1er octobre 2013 à Assa également et pour les mêmes raisons que Brahim, observe une grève de la faim à la prison d’Ait Melloul depuis le 4 avril 2014 pour protester contre les conditions de détention et réclamer sa séparation des prisonniers du droit commun. Son procès en appel est prévu pour le 29 avril prochain. 

Le 24 avril 2014, la même cour d’Agadir a reporté au 30 avril l’appel des quatre défenseurs sahraouis des droits de l’Homme Sidi Sbai, Mohamed Jemour, Hafed Toubali et Bachir Bouâmoud, qui ont été condamnés en première instance à Tiznit à des peines allant de 4 à 6 mois de prison ferme pour « agression sur des agents de police dans l’exercice de leurs fonctions ». Rappelons qu’ils avaient été arrêtés et empêchés d’entrer à la ville d’Ifni qui accueillait des militants sortis de prison.   

D’autres arrestations au sein des défenseurs des droits de l’Homme à Berchid nous ont été signalées. Hind Bharti, membre de l’AMDH-section de Berchid, a été arrêtée le 15 avril 2014 après s’être solidarisée avec des familles victimes d’expropriation à la commune de Had Soualem. Mohamed Dyan, membre également de l’AMDH-Oulad Abbou, a eu le même sort le 10 avril 2014 quand il s’est présenté à la gendarmerie pour réclamer la libération d’un jeune de l’association. Présenté au tribunal de première instance de Berchid le 14 avril, son procès a été reporté au 21 du même mois.

Nous avons été informés également par le PADS de l’enlèvement à Tanger de Abdelali Jaouat, un membre de sa jeunesse. Cet enlèvement, survenu le 15 avril 2014, était accompagné de violences avant son transfert à la préfecture de la sûreté pour y être interrogé sur les motivations de sa visite à Tanger.

Pour clore ce point, nous rappelons qu’une caravane internationale (voir points précédents) est organisée du 24 au 27 avril 2014 par ATTAC/CADTM-Maroc et l’Association de protection populaire pour le Développement Social pour se solidariser avec les femmes de Ouarzazate, victimes des dérives du microcrédit (surendettement, saisies, procès). Deux des animateurs du mouvement de défense de ces victimes, Amina Mourad etBennacer Ismaïni, ont été condamné(e)s, le 11 février dernier, à un an de prison ferme et 30 000 dirhams d’amende. Ils attendent en liberté provisoire le renvoi en cassation.

Le bureau exécutif de l’ASDHOM

Paris, le 25 avril 2014  

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