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Le 6 avril dernier, trois centrales syndicales (UMT-CDT-FDT) ont organisé une marche à Casablanca pour demander la reprise du dialogue avec le gouvernement. Les militants du M20F ont répondu présent à l’appel comme la plupart des citoyens.
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Aux environs de 12 h 15, les forces de l’ordre sont intervenues pour isoler et réprimer ces jeunes qui manifestaient dans la bonne humeur, l’ordre et la discipline (l’un d’entre eux, Hamza Heddi s’est vu briser le mégaphone sur la tête)… pour les embarquer dans les fourgonnettes de la police au vu des autres manifestants ébahis sans pouvoir les secourir.
Les autres militants, en avance sur le cortège furent avisés de l’arrestation au moment où la marche s’approchait de la fin et se sont dirigés vers la préfecture de police pour protester contre cette arrestation pour le moins illégale ! Mais les forces de l’ordre les ont repoussés au point d’en violenter quelques uns.
Devant le refus de non-recevoir des responsables sécuritaires, ils ont dépêché des avocats sur place. Suite à une longue attente jusqu’à 20 h, on leur apprend que les jeunes ont été mis en garde à vue à la prison d’Oukacha et qu’ils passeront devant le juge mardi 8 avril. Deux d’entre eux furent relâchés et poursuivis en état de liberté provisoire.
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Selon les procès verbaux (PV)de la police judiciaire, ces jeunes sont accusés de participation à une manifestation non autorisée et violence à l’encontre de cinq fonctionnaires de la police avec certificats médicaux à l’appui, délivrés à 10 h du matin alors que la marche n’a démarré qu’à 10 h 30.
Ces chefs d’inculpation figurent sur les 11 PV dont deux furent signĂ©s sans lecture, les neuf restants n’ont pas Ă©tĂ© signĂ©s.Â
Les sécuritaires responsables du bon déroulement de la marche affirment avoir agi à la demande incessante des organisateurs qui les avaient alertés de la présence d’éléments perturbateurs étrangers au cortège et susceptibles de provoquer des troubles parmi les manifestants avec leurs « slogans anti-régimes » alors qu’aucun incident n’a eu lieu auparavant et les trois syndicats n’ont cessé de démentir la version des autorités par un communiqué commun obtenu parles avocats de la défense et transmis au juge. Non seulement ils démentent, mais ils dénoncent l’arrestation de ces jeunes, exigent leur libération immédiate et leur témoignent leur solidarité.
Les sécuritaires responsables du bon déroulement de la marche affirment avoir agi à la demande incessante des organisateurs qui les avaient alertés de la présence d’éléments perturbateurs étrangers au cortège et susceptibles de provoquer des troubles parmi les manifestants avec leurs « slogans anti-régimes » alors qu’aucun incident n’a eu lieu auparavant et les trois syndicats n’ont cessé de démentir la version des autorités par un communiqué commun obtenu parles avocats de la défense et transmis au juge. Non seulement ils démentent, mais ils dénoncent l’arrestation de ces jeunes, exigent leur libération immédiate et leur témoignent leur solidarité.
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Une multitude d’incohérences, d’irrégularités et de vices de forme qui jalonnent les PV et la procédure d’arrestation furent relevés par les avocats de la défense et pointés du doigt tout au long des audiences ; à commencer par la garde à vue qui a violé le code pénal : les militants ne savaient pas de quoi ils étaient accusés et n’ont pu prévenir leurs familles (art.60 du CPP), en passant par le caractère public de l’audience et finissant par les PV comportant des vices de forme.
Dans un mémorandum présenté au juge chargé de l’affaire, Maître Messaoudi, l’un de leurs avocats (plus d’une trentaine) évoque plusieurs exceptions aux fins de non recevoir ainsi que des irrégularités de forme et de procédure aussi gênantes les unes que les autres.
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D’abord, le caractère public de l’audience est violé à maintes reprises depuis le 8 avril 2014, début du procès, par l’interdiction aux familles, ami(e)s, organisations de défense des droits humains d’accéder au tribunal pour assister à l’audience ; les rares fois où c’était possible, cela se passait de façon détournée.
Ensuite, les PV de la Police Judiciaire portent l’entête du Ministère de l’Intérieur et de la DGSN, ce qui signifie que ces administrations ont réalisé toutes les procédures relevant de la BNPJ dans cette affaire. Or, ni le Ministère de l’Intérieur ni la DGSN ne sont concernés par les missions judiciaires de fonctionnaires de la Sûreté Nationale en leur qualité d’officiers de la Police Judiciaire relevant du Ministère de la Justice.
Par consĂ©quent, ces PV rĂ©digĂ©s par des administrations juridiquement incompĂ©tentes sont Ă annuler. Dans le mĂŞme ordre d’idĂ©es, l’avocat constate des diffĂ©rences sur une version du PV et le reste des copies et soupçonne la Police Judiciaire d’avoir ajoutĂ© un paragraphe entier au document pour la partie concernant la prĂ©vention prĂ©ventive.Â
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Une autre remarque concerne l’absence de flagrant délit et d’éléments matériels : pour justifier le flagrant délit, l’Officier de la Police Judiciaire déclare sur le PV avoir vu deux éléments de la police blessés sans préciser avoir vu les auteurs de l’infraction ni la façon dont cette infraction a été commise ; il signale uniquement avoir procédé à l’arrestation de personnes ayant refusé de quitter les lieux. Aussi, les PV mentionnent-ils que victimes présumées ont été blessées par des bâtons servant de supports aux banderoles.
Or, la dĂ©fense rappelle l’obligation pour l’Officier de La PJ de procĂ©der Ă la constatation mais surtout Ă la prĂ©servation des Ă©lĂ©ments de preuves (art.57du CPP). Toujours dans la sĂ©ries des anomalies, les certificats mĂ©dicaux dĂ©livrĂ©s par le ou les mĂ©decins aux prĂ©tendus policiers agressĂ©s mentionnĂ©s sur les PV portent date et heure : 6 avril Ă 10h du matin alors que la marche n’a dĂ©marrĂ© qu’à 10h30.Â
D’ailleurs, lors de la dernière audience marathonienne avant le verdict, l’avocat gĂ©nĂ©ral affirme, sans convaincre personne, qu’il s’agit d’une petite erreur : le mĂ©decin voulait Ă©crire 10h du soir, au lieu de 10 h du matin.Â
Mais que dire aussi de l’heure d’arrestation et celle de la rédaction des PV (13h30) alors que l’arrestation a eu lieu à 12h15 et la marche a pris fin à 13h sachant qu’ils ont été arrêtés pendant la marche pas à la fin ?
Quant aux chefs d’inculpation dont ils étaient accusés à savoir la participation à une manifestation non autorisée (dans une manifestation autorisée) et coups et blessures sur agents de police, ils défient toute logique et surprennent plus d’un…
Sans être expert en matière de procédure, si ces militants ont répondu à l’appel lancé à tous les citoyens pour participer à la marche, on voit mal tout un chacun demander une autorisation de participation ! Et pourquoi juste ces 11 personnes au milieu/parmi ces 50 000 autres selon les organisateurs ?
La seconde accusation aussi ne manque pas de nous interpeller : connaissant la nature non violente du M20F depuis sa naissance en février 2011, connaissant surtout le caractère répressif de toutes les interventions policières à travers le royaume, on peine à croire que la violence vienne des militants ! Mieux, une vidéo existe montrant l’intervention de la police du début à la fin de l’arrestation et ce n’est pas dans les véhicules ou dans les locaux de la police que l’agression risque de se produire si ce n’est des agents eux-mêmes.
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Depuis leur arrestation jusqu’au verdict, une caravane de solidarité s’est constituée regroupant militant(e)s, ami(e)s et divers défenseurs des droits humains qui se sont mobilisés en organisant des sit-in devant le tribunal à chaque début audience et après, devant la prison aussi . Militant(e)s du M20F, défenseurs des droits de l’homme, anciens prisonniers politiques s’insurgent, crient leur colère et leur indignation contre ce procès ubuesque durant les sit-in : « liberté immédiate pour les prisonniers politiques », « ils sont détenus pour nous, militons pour eux ».
Comme chaque mardi, jour d’audience, l’accès au tribunal est un exploit jonchĂ© d’obstacles sinon carrĂ©ment interdit. Quelquefois, 2 ou 3 membres de l’AMDH (Association Marocaine des Droits Humains) reçoivent le sĂ©same et sont autorisĂ©s Ă assister Ă l’audience comme un privilège !Â
A chaque audience aussi, la salle est comble, la présence policière est palpable et les détenus ne manquent pas de lever le signe de la victoire pour saluer qui les attend ! Par contre, les plaignants ne se sont jamais présentés !
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Les plaidoiries de la dĂ©fense se succèdent mais ne se ressemblent pas et chacune d’elles est une dĂ©monstration rhĂ©torique de l’absurditĂ© de ce procès kafkaĂŻen. L’un des avocats attire l’attention du juge sur l’état de santĂ© d’un des inculpĂ©s souffrant de tuberculose requĂ©rant pour lui prioritairement une mise en libertĂ© provisoire , mais le juge n’a pas cru nĂ©cessaire d’ordonner son hospitalisation.Â
Le cas de ce garçon de café à lui seul devrait alerter les consciences : Hamid Alla ne fait pas partie du M20F. Il n’a pas non plus pris part à la marche du 6 avril. Ce dimanche, il était juste attablé à la terrasse d’un café et prenait des photos avec son Smartphone sans se douter un instant que cet acte photographique allait le conduire en prison au même titre que les 10 activistes du M20F avec les mêmes chefs d’inculpation. Hamid est tuberculeux, il devrait séjourner dans un sanatorium pour soins intensifs au lieu d’un pénitencier où il risque gros !
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Le verdict inattendu :
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Il est tombĂ© comme une massue sur nos tĂŞtes bien que l’arrestation d’une autre icĂ´ne du M20F- Mouad Belghouat, alias LHA9ED– prĂ©sentĂ© au juge en audience le mĂŞme jour Ă la mĂŞme heure nous ait donnĂ© un avant-goĂ»t de cette mascarade judiciaire :
Hamza Heddi, Youssef Bouhlal, Hamid Alla, Abdellatif Sersari et Ghani Zaamoun ont écopé d’un an de prison ferme. Mustapha Aaras, Ayoub Boudad, qui voit son année d’étude en ingénierie voler en éclat comme d’autres d’ailleurs, Hakim Serroukh et Mohamed Harraq sont condamnés à 6 mois de prison ferme. Quant aux deux poursuivis en état de liberté provisoire, Amine Lekbabi et Fouad Lbaz ont écopé de 2 mois avec sursis et 5000.dh d’amende.
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En définitive, ce verdict est une injustice qui sonne comme une vile revanche sur le M20F. Condamnés sévèrement pour leur appartenance au Mouvement, la défense a jugé qu’il s’agit d’un procès politique et a décidé de faire appel.
Inutile de dĂ©crire l’atmosphère insoutenable de ce jugement politique inique, digne des annĂ©es de plomb que nous croyions derrière nous !Â
La liberté de penser et d’exprimer ses opinions est toujours otage du Makhzen profond. Toutes celles et ceux qui s’y exercent subissent le même sort : interdiction, arrestation, condamnation, emprisonnement ; parfois d’autres méthodes d’intimidation sont utilisées à l’encontre des militant(e)s, cela peut aller du tabassage au viol ( le cas d’Oussama Housne) qui constituerait une rubrique à part.
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Baroudi Rachida, militante AMDH
Rabat, 23 mai 2014.